Le droit d’accès à l’information en droit suédois : une épopée de 250 ans

par Patricia JONASON, Maître de conférences à l’Université Södertörn, Stockholm (Suède).

Le droit d’accès à l’information, qui a fait sa première apparition dans l’ordre juridique suédois en 1766 à la faveur de l’adoption de la première loi fondamentale sur la liberté de la presse, fête, en cette année 2016, ses 250 ans. Le qualificatif d’épopée se prête sans aucun doute à l’histoire de ce droit. En effet, celle-ci s’accommode parfaitement des définitions relevées sur Wikipédia qui présente l’épopée comme un «long poème d’envergure nationale narrant les exploits historiques ou mythiques d’un peuple» ou dans le Larousse, selon lequel une épopée est «une suite d’actions extraordinaires, merveilleuses, étonnantes ou héroïques». Ainsi, d’une part le droit d’accès à l’information – ou plus exactement le droit d’accès aux documents1 – n’est-il pas un droit comme un autre dans le paysage juridique suédois. Il constitue plutôt une idéologie2, propre à la Suède, qui s’est formée au cours des siècles et participe largement du mythe de la société suédoise ouverte et transparente. Mais c’est également un droit qui a, au cours de sa longue existence, fait face à un certain nombre de bouleversements et de défis. C’est sur ces défis que nous ferons porter notre présentation (§ 2) sans omettre d’exposer au préalable dans ses grandes lignes le régime contemporain du droit d’accès aux documents (§ 1).

§ 1 – Traits généraux du droit suédois d’accès à l’information

Le droit d’accès suédois a plus de deux cents ans d’avance sur ses successeurs3. L’ancienneté de cette institution et l’intromission de celle-ci dans le corps institutionnel et social suédois (B) expliquent tout autant, si ce n’est davantage, que le régime juridique proprement dit (A), les caractéristiques qui en font sur la scène internationale un modèle jusqu’à présent inégalé.

Le régime juridique du droit d’accès aux documents publics

L’acte de naissance du droit d’accès suédois est constitué par la loi fondamentale sur la liberté de la presse (Tryckfrihetsförordningen) adoptée le 2 décembre 1766. Les Finlandais – il faut se souvenir que la Finlande faisait partie du Royaume de Suède à l’époque) – insistent sur la paternité de ce droit qui reviendrait à Anders Chydenius, finlandais-suédois né en Finlande en 1729, surnommé, en raison de ses idées libérales, le Adam Smith du Nord. Les Suédois quant à eux préfèrent rappeler les raisons de son introduction, à savoir la volonté pour le parti qui fut vainqueur en 1766 de s’assurer à l’avenir s’il se retrouvait dans l’opposition de pouvoir contrôler l’action administrative et gouvernementale.

Le droit d’accès à l’information a, quoi qu’il en soit été inclus dans la loi fondamentale sur la liberté de la presse en tant qu’il constituait une condition de l’exercice du droit de publier des opinions et des documents, telles les minutes des administrations. On trouve ici dès l’origine un trait caractéristique, qui subsiste de nos jours, du droit d’accès à l’information suédois : son lien étroit avec l’exercice de la liberté de la presse.

L’histoire du droit d’accès aux documents officiels n’a pas été sans être mouvementée, tout comme celle de la liberté de la presse à laquelle il a dès son origine été rattaché4. Toutefois on peut affirmer, avec le Professeur Peter Seipel, grand expert suédois en matière d’accès à l’information que la Suède «a une tradition plutôt longue et ininterrompue en matière de droit d’accès aux documents officiels»5.

C’est toujours dans la loi fondamentale sur la liberté de la presse qu’est régi le droit d’accès aux documents officiels. Le texte en vigueur actuellement, qui date de 1949, lui consacre son chapitre 2 intitulé «De la publicité des documents officiels».

Contrairement à ce qui est le cas dans d’autres droits nationaux où seul le principe du droit d’accès à l’information est garanti au niveau constitutionnel – tandis qu’est dévolue à la loi la tâche de formuler les règles précises de ce droit – le droit d’accès à l’information est en Suède régi en détail dans un texte de valeur constitutionnelle. Ainsi, les dispositions du chapitre 2 de la loi fondamentale sur la liberté de la presse posent par exemple la définition des documents soumis au droit d’accès et les diverses conditions qui entourent l’exercice de ce droit. Elles contiennent également la liste des catégories d’intérêts – publics et privés – autorisant le législateur à prévoir des exceptions au droit d’accès.

Outre le statut particulier du droit d’accès en Suède, qui a des implications à caractère juridiques, en vertu du principe de la hiérarchie des normes, mais également symbolique, il convient de souligner son caractère fort généreux. En effet, a priori, tout document détenu par une administration, qu’il renferme des informations à caractère public ou privé, est susceptible d’être l’objet du droit d’accès, à moins que le secret soit prévu et applicable dans le cas précis. Or, le dispositif ouvrant la voie à l’application du secret et donc au refus par les agents de l’administration de donner accès aux documents demandés est conçu de telle façon que la marge d’appréciation des fonctionnaires quant à la possibilité d’appliquer ou non les règles sur le secret est fort réduite. En effet, le fonctionnaire n’est pas autorisé à opposer un refus à une demande d’accès seulement lorsqu’une disposition de la loi sur la publicité et le secret (offentlighetsoch sekretesslagen) prévoit une telle possibilité. Cette loi, adoptée en vertu de la loi fondamentale elle-même, qui prévoit que les exceptions motivées par les intérêts privés ou publics tels qu’exhaustivement indiqués au chapitre 26 doivent être consignées en détail dans un texte législatif, contient des dispositions détaillées sur les cas dans lequel les règles sur le secret sont effectivement applicables. La loi sur la publicité et le secret contient ainsi une cinquantaine de dispositions destinées à protéger des intérêts publics tels que par exemple la sécurité du Royaume, les relations entretenues avec des États étrangers ou des organisations internationales ou encore la politique fiscale et monétaire, tandis qu’environ 250 dispositions sont consacrées à la protection d’intérêts privés, qu’il s’agisse de la protection d’informations liées à la personne ou de nature économique. Ces dispositions contiennent en général des informations au cas par cas sur la ou les autorités publiques ou encore les secteurs de l’administration auxquels s’appliquent les règles sur le secret. Elles comportent également des indications sur le genre de données soumises au secret7 ainsi que sur le dommage requis en l’occurrence afin que le fonctionnaire puisse opposer le secret.

Ce dispositif constitué de deux étages, la loi fondamentale indiquant la liste, exhaustive, des intérêts susceptibles d’être invoqués par le législateur pour limiter l’accès au droit d’accès et la loi sur la publicité et le secret contenant les cas précis dans lequel il est permis au fonctionnaire saisi d’une demande de refuser l’accès à un document public réduit ainsi considérablement le pouvoir discrétionnaire des agents de l’administration, qui ne peuvent, comme en France par exemple, fonder un refus sur une disposition vague mais doivent au contraire appuyer leur décision sur une disposition législative spécifique8. Parmi les autres éléments du dispositif sur le droit d’accès aux documents officiels illustrant l’a priori favorable du constituant et législateur à l’égard de l’existence d’une mise en œuvre du droit le plus efficace possible, on peut citer par exemple les courts délais requis par la loi fondamentale pour la communication par les autorités publiques des documents demandés. En ce qui concerne les demandes d’accès effectuées in situ, la loi fondamentale requiert des administrations qu’elles procèdent à la communication «immédiatement ou aussitôt que possible». Les demandes d’accès sous la forme de copies des documents demandés doivent quant à elles être traitées «rapidement». Il est également intéressant de mentionner le dispositif contenu dans la loi (1986:223) sur la procédure administrative qui impose aux autorités publiques des horaires d’ouverture au public de deux heures minimum, chaque jour ouvré, dans le but explicite de réceptionner et procéder à l’enregistrement de documents officiels ainsi que pour être en mesure d’accueillir des demandes d’accès.

Sans entrer davantage dans les détails de la législation suédoise sur le droit à l’information9, nous pouvons constater que les textes instituent un régime juridique favorable à un accès large aux documents administratifs et une mise en œuvre efficace de l’exercice du droit d’accès. Cependant la lettre n’explique pas à elle seule les bonnes performances et la notoriété du droit d’accès suédois. La pratique, en effet essentielle, va aussi dans ce sens.

Une pratique ambitieuse

Il est bien sûr délicat d’identifier avec exactitude les facteurs qui permettent d’expliquer les bases politico-socio-juridiques qui soutiennent, en même temps qu’elles constituent, la société d’un pays donné. Toutefois l’ancienneté du droit d’accès semble pouvoir en partie expliquer le caractère comme transcendant de ce droit dans la pratique des organes de l’État ainsi que sa résonnance dans la société suédoise tout entière.

L’observateur attentif de l’administration suédoise remarquera qu’en principe tout agent de l’administration a intégré comme réflexe administratif la transparence, réflexe qui quelquefois va au-delà de ce qui est requis par les textes10. Un fonctionnaire saisi d’une demande d’accès à un document officiel a ainsi comme programmé dans ses gènes de faire droit en priorité à une demande d’accès à des documents, délaissant les tâches autres auxquelles il se consacrait dans l’instant – traitement d’un dossier par exemple. L’attitude des agents de l’administration à l’égard du droit d’accès aux documents est embrassée et confortée par la position adoptée par les organes chargés du contrôle du respect de la loi par les autorités publiques. Les juridictions de l’ordre administratif et l’Ombudsman parlementaire font en effet une interprétation des textes favorisant l’efficacité du dispositif sur la transparence administrative. La jurisprudence de l’Ombudsman parlementaire est de toute importance dans ce domaine, notamment pour les questions d’ordre procédural telles que les délais de délivrance des documents11. Cette institution spécialisée en matière de maladministration et qui constitue un moyen de droit parallèle à celle procurée par les juridictions compte parmi les quelque 5000 plaintes qu’elle traite annuellement environ 300 qui ont trait à des questions d’application de la législation sur l’accès aux documents.

La pratique ambitieuse du droit d’accès n’est pas le seul fait de la «partie redevable», c’est-à-dire des organes de l’État à qui incombe de communiquer les documents détenus par l’administration. Elle est aussi le fait des acteurs exerçant leur droit d’accès, tout particulièrement des organes de presse/journalistes. Ce corps, aux pouvoirs et influences non négligeables, fait non seulement un usage fréquent de l’exercice du droit d’accès à l’information, mais en outre, il se pose en défenseur intransigeant et invétéré du principe de l’accès aux documents officiels, donnant parfois l’image que l’exercice du droit d’accès lui appartient en propre et non au public en général. Deux exemples illustrent bien cette position frondeuse. Le premier a trait à une campagne menée dans les années 1990 par l’association des journalistes suédois Journalistförbundet afin de défendre le droit d’accès contre les atteintes que lui faisait courir, d’après cet organisme, la transposition dans le droit suédois de la directive européenne 95/46/CE sur la protection des données personnelles. Le slogan utilisé, adaptation du fameux slogan français était : «touche pas à mon principe de publicité»! Le second exemple, plus récent, concerne une tribune publiée en avril 2016 dans un grand quotidien national suédois par un groupe de journalistes et autres personnes travaillant dans le domaine des médias. Ces personnalités y font part de leurs vives critiques à l’égard d’un projet de loi en préparation portant modification des règles sur le secret concernant les informations relatives aux agents de l’administration. Le législateur a en effet l’intention d’introduire un dispositif empêchant la divulgation du numéro d’identification des agents de l’administration dans le cas où la divulgation pourrait avoir pour conséquence que l’agent ou l’un de ses proches fasse l’objet de violences ou subisse des dommages sérieux12. Cette réforme – qui, si elle est adoptée, étendrait à toutes les catégories d’agents de l’administration un dispositif protecteur de la vie privée qui existe déjà pour les catégories de fonctionnaires les plus menacés – a pour but d’adapter le droit d’accès au durcissement du climat sociétal et rendre les fonctionnaires moins vulnérables. Les journalistes auteurs de la tribune font valoir quant à eux qu’une telle réforme de la loi conduirait dans certains cas à rendre impossible le travail d’investigation des journalistes et par conséquent la mise à jour de scandales et dysfonctionnements13.

Le droit d’accès aux documents, qui peut sans exagération être qualifié de principe fondamental et cardinal de la société et du régime politique suédois, sous-tend les rapports entre l’État et les citoyens et même dans une certaine mesure les rapports des citoyens entre eux.

Dans les rapports entre les organes de l’État et des citoyens, sur un plan vertical, le droit d’accès a une influence certaine sur la qualité de l’accomplissement de leurs activités par les agents de l’administration et les autorités publiques. L’existence d’un droit d’accès à la mise en œuvre efficace agit de façon préventive et constitue sans aucun doute un facteur explicatif de la loyauté des agents de l’administration à la loi, attitude qui, en comparaison avec d’autres ordres juridiques, caractérise les institutions administratives suédoises.

Les rapports entre les citoyens eux-mêmes, sur un plan horizontal, sont également concernés par le régime de l’accès à l’information tel qu’institué en Suède, puisque, à l’aide du droit d’accès aux documents, il est aisé pour tout un chacun d’obtenir communication d’informations concernant des tiers, sous réserve de l’application des règles sur le secret, et que la publication des informations personnelles est permise14. Ceci participe sans aucun doute d’un «esprit de transparence», à la limite du contrôle social quelquefois.

§ 2 – Les défis rencontrés par le droit d’accès à l’information suédois

Le droit d’accès a durant les 250 années qui ont suivi son apparition été confronté à un certain nombre de défis. Durant la période ancienne, c’est-à-dire jusqu’en 1949, date à laquelle le droit d’accès aux documents a été introduit dans une nouvelle loi fondamentale sur la liberté de la presse, toujours en vigueur actuellement, le principe a fait l’objet à certaines périodes de remises en cause tantôt partielles, tantôt totales, au gré des régimes qui se sont succédé.

En ce qui concerne la période contemporaine, les défis ont été et sont toujours variés et nombreux et ne sont pas toujours perçus ou reconnus comme tels par les protagonistes.

Certains des défis ou problèmes posés au droit d’accès aux documents ont pour origine la pratique des utilisateurs (A), d’autres sont engendrés par des obligations juridiques mises à la charge de l’État suédois du fait de son adhésion à l’Union européenne (B). Une troisième catégorie de défis est directement liée aux avancées en matière technologiques15 (C).

Des défis liés à la pratique des utilisateurs

Sous cette catégorie seront traités deux sortes de défis, ceux dus à une sorte de «détournement» du droit d’accès et ceux relevant de l’abus de ce même droit.

Il arrive que le droit d’accès aux documents fasse l’objet de ce que nous qualifierons de «détournement». En effet, ce principe aux visées démocratiques est quelquefois utilisé dans un but purement commercial, notamment par deux journaux à tirage national, qualifiés de journaux caniveau. Ces derniers requièrent auprès d’administrations la communication d’informations à caractère personnel. Ces informations sont ensuite publiées pour susciter la curiosité (malsaine?) des lecteurs et accroître en conséquence la vente de leurs numéros. Ainsi n’est-il pas rare de voir l’un de ces deux journaux affublés de titres tels que «voici la liste de vos voisins qui paient le plus d’impôts». Quoi qu’il en soit cette question de détournement du droit d’accès est comme ignorée, jamais mentionnée dans les débats ou discussions doctrinales et de praticiens.

Le second problème auquel est confronté le droit d’accès consiste dans l’exercice abusif qui peut en être fait, par les utilisateurs. Or, la législation suédoise sur le droit d’accès est dépourvue de dispositif permettant aux administrations victimes de tels abus de s’en prémunir. Une affaire significative dont a été saisi l’Ombudsman16, sur plainte de l’utilisatrice du droit d’accès qui était elle-même à l’origine de l’abus, montre bien les défaillances du système. La plaignante en question avait fait usage de son droit d’accès d’une manière qui s’apparentait à un harcèlement des fonctionnaires et des services municipaux destinataires de ses demandes d’accès. Cette habitante de la municipalité de Hultsfred qui avait en effet effectué un nombre incommensurable de demandes de communication auprès de différents services de sa commune de résidence. Ses requêtes d’accès à des documents ont atteint des milliers de pages que la requérante ne venait finalement pas consulter. Une information corroborant la nature abusive, harcelante et irrationnelle de l’exercice du droit d’accès de la requérante en question est fournie par le nombre de comptes mail, une cinquantaine, dont a fait usage la demanderesse pour effectuer ses demandes d’accès. Malgré les conséquences financières et autres – psychologiques notamment – pour les organes de l’État que peut entraîner ce genre de comportement, le problème est passé sous silence, comme étouffé, le principe du droit d’accès étant trop sacré pour que l’on puisse lui porter atteinte en instaurant un dispositif permettant, comme c’est le cas dans certaines législations, telle la législation française par exemple, de permettre aux agents de l’administration de rejeter les demandes d’accès «abusives».

Les défis d’ordre juridique

Nous en donnerons deux exemples, l’un plus spécifique, qui s’est traduit par la difficulté de transposer dans le droit suédois une directive européenne sur la réutilisation des données publiques, l’autre à caractère plus général puisqu’il est relatif aux bouleversements qu’implique l’adhésion de la Suède à l’Union européenne sur l’articulation du principe de la transparence administrative et des impératifs de protection de la vie privée.

Le premier exemple a trait aux difficultés rencontrées par le législateur suédois dans le cadre de la transposition de la première directive européenne 2003/98/CE17 sur la réutilisation des informations du secteur public. La Suède – c’est un comble pour la patrie du droit d’accès! – a fait l’objet d’un début de recours en manquement de la part de la Commission européenne avant que la procédure de transposition sinueuse suivie ne résulte, avec cinq années de retard sur le délai de transposition requis par la directive, dans l’adoption de la loi (2010:566) sur la réutilisation des documents de l’administration18. Si le défi juridique posé par la transposition n’a pas eu de conséquence directe sur le principe d’accès aux documents administratifs lui-même – c’est au contraire le principe du droit d’accès qui, du fait de sa place proéminente, n’a laissé que peu de place dans l’ordre et la pensée juridiques suédois au droit à la réutilisation des données publiques – il n’en demeure pas moins qu’il a posé et pose certains problèmes aux acteurs du droit, notamment le législateur et les agents de l’administration qui, conceptuellement parlant, ont du mal a faire le départ entre les deux législations19.

Le second exemple concerne un défi de nature davantage juridico-culturelle, tirant son origine dans le «choc européen» subi par la Suède suite à son entrée dans l’Union européenne. Le Royaume s’est ainsi retrouvé en présence d’États empreints de la tradition du secret et s’est vu soumis à des exigences élevées en matière de protection de la vie privée, quelquefois difficilement conciliable dans leur esprit avec le régime du droit d’accès tel que conçu par les Suédois. Un exemple significatif de la confrontation des traditions est constitué par l’insertion, à la demande de la Suède alors en passe de devenir membre de l’Union européenne, d’un considérant 72 dans la directive 95/46/CE sur la protection des données personnelles selon lequel «la présente directive permet de prendre en compte, dans la mise en œuvre des règles qu’elle pose, le principe du droit d’accès du public aux documents administratifs».

Le droit d’accès à l’information face au développement technologique

Les rédacteurs de la loi fondamentale sur la liberté de la presse de 1949, encore en vigueur aujourd’hui, n’avaient pas, cela va de soi, su anticiper l’évolution technologique et le passage d’une «société papier» à une «société électronique» entraînant dans le même temps le passage d’une «administration papier» à une administration électronique et numérique.

C’est d’abord le juge suédois à la fin des années 60 qui, au moyen d’une interprétation extensive de la notion de documents officiels, a permis d’inclure dans le champ d’application du chapitre 2 de la loi fondamentale sur la liberté de la presse les enregistrements informatiques (constitués à l’époque de bandes magnétiques). Le législateur s’est finalement emparé de la question et a, en 1976, adopté une définition du document officiel techniquement neutre. Il a en effet étendu le contenu de la définition des documents officiels aux «enregistrements qui peuvent, uniquement à l’aide de moyens techniques, être lus, écoutés ou dont le contenu peut être accessible d’une autre manière». Grâce à cette définition, et au fur et à mesure de l’évolution des technologies, les juges suédois n’ont pas eu de mal à considérer comme document tombant dans le champ d’application de la loi fondamentale les cookies et les SMS par exemple. Ainsi le droit d’accès a-t-il su s’adapter sans problème sur ce point. Sur d’autres questions, le défi a été plus conséquent. Ce que nous allons illustrer à travers deux exemples.

Avant d’aborder ces questions il convient cependant de souligner que les acteurs juridiques suédois, parmi lesquels le législateur, mettent en exergue les bénéfices que procure l’évolution des nouvelles technologies pour le droit d’accès aux documents officiels : les nouvelles technologies permettent un accès des documents à distance et de réduire les coûts de l’accès; les moteurs de recherche mis à disposition par les nouvelles technologies facilitent l’identification des documents souhaités par le demandeur et permettent la fabrication de documents sur mesure. Le législateur a d’ailleurs tenu compte de cette dernière possibilité en étendant le droit d’accès à ce que la doctrine suédoise a qualifié de «document potentiel». Toujours dans le sens d’une prise en compte des avantages que peuvent procurer les nouvelles technologies pour l’exercice du droit à l’information, le législateur impose aux administrations de se doter d’un système informatique adapté à l’exercice du droit d’accès. Mais comme mentionné ci-dessus, les nouvelles technologies peuvent également être problématiques au regard du droit à l’information, ainsi que le montre les deux exemples ici choisis, la question du format dans lequel est communiqué le document objet de la demande et la question des copies de sauvegarde.

Le premier exemple de défi posé au droit d’accès aux documents officiels par les nouvelles technologies est celui concernant le format utilisé pour la délivrance des documents objet d’une requête.

La question qui se pose est plus précisément celle de savoir s’il est approprié ou non d’accorder à celui ou celle qui requiert l’accès à un document le droit de choisir le format – ce qui inclut le format électronique – sous lequel lui sera délivré le document. Cette interrogation peut paraître étrange pour des juristes non suédois accoutumés à ce que la loi nationale prévoie le droit du demandeur de choisir le format, comme c’est le cas en France par exemple. En Suède c’est cependant une question légitime puisque le droit d’accès a un champ d’application très large. Le dispositif permettant de rejeter les demandes d’accès est, comme indiqué plus haut, conçu de telle manière qu’en pratique le secret est rarement opposable, même lorsque la demande porte sur des documents contenant des informations à caractère personnel. Or, permettre au demandeur de recevoir des documents sous la forme électronique, si cela est son choix, peut avoir des conséquences néfastes en matière de protection de la vie privée, le format digital facilitant l’exploitation et la diffusion des informations. La Suède en a fait l’expérience tout particulièrement dans une affaire où la demande d’accès et la communication consécutive des documents ont conduit à la publication sur un site Internet, et sans que les intéressés n’aient aucun moyen d’y mettre fin, d’un dossier judiciaire contenant des informations de nature tout spécialement sensible20. Pour parer à de tels inconvénients, le législateur avait à la fin des années 1990, refusé de consacrer un droit général au choix du format dans la loi fondamentale sur la liberté de la presse. Il avait, au contraire adopté une solution de compromis en insérant dans le texte constitutionnel une disposition selon laquelle une administration n’a pas l’obligation de fournir un document détenu par elle sous la forme électronique dans un format autre que le format papier à moins que la loi en dispose autrement. De nombreuses voix se sont élevées depuis dénonçant le caractère non seulement restrictif du dispositif suédois mais également son caractère aberrant eu égard aux possibilités que fournissent les nouvelles technologies pour améliorer le droit d’accès aux documents officiels. Le législateur s’est finalement remis à la tâche. Dans un rapport intitulé Document officiels sous forme électronique - Publicité et vie privée21 comptant environ 500 pages, le comité parlementaire chargé de la première phase de la procédure législative, réitérant les craintes sur les menaces que peut faire courir à la vie privée l’accès des documents dans un format électronique, propose, sans aller jusqu’à introduire le droit du choix au format, d’inverser toutefois le principe en vigueur. En remplacement du principe actuel selon lequel il y a droit au choix du format si cela est prévu par la loi, il est proposé d’inscrire dans la loi celui selon lequel il existe un droit de choix du format (à condition que le document existe sous la forme électronique) à la triple condition que : le document ne contienne pas d’informations protégées par le secret, qu’aucun texte législatif ou réglementaire ne s’oppose à la communication sous un tel format, qu’une telle communication ne soit pas par ailleurs inopportune. Cette proposition de texte qui n’a pas encore été adoptée tente, comme nous pouvons le constater, de déplacer quelque peu le curseur dans le cadre de l’équilibre à atteindre entre le droit à l’accès aux documents d’une part et l’impératif de protection de la vie privée, d’autre part en augmentant les possibilités pour le public de requérir les documents sous une forme électronique.

Le second exemple choisi pour illustrer les défis technologiques auxquels est confronté le droit d’accès à l’information et la façon dont celui-ci riposte, par la voix du législateur, est celui des copies de sauvegarde. En effet les systèmes informatiques des autorités publiques suédoises, avec tous les communications et autres documents qu’ils comportent, font, à intervalles réguliers, l’objet d’une copie de sauvegarde. Or, la question s’est posée de savoir si de telles copies pouvaient être considérées comme des documents officiels et à ce titre être soumises aux règles sur le droit d’accès. Cette question du statut juridique des copies de sauvegarde a fait son apparition de façon tout à fait impromptue sur la scène juridique suédoise dans le contexte de la catastrophe du tsunami de 2004 qui avait coûté la vie à un nombre important de Suédois22. Suite à une gestion défaillante de la situation de crise par le gouvernement de l’époque qui avait mis du temps à comprendre la gravité de la situation, une commission d’enquête parlementaire a été mise en place afin de faire toute la lumière sur la responsabilité des uns et des autres. C’est dans le cadre de ses investigations que la commission a comme inopinément eu accès à des documents dont personne ou presque ne semblait connaître l’existence : dix-neuf bandes informatiques que l’on a surnommées les «bandes du tsunami», renfermant toutes les informations contenues dans les systèmes informatiques du gouvernement entre le 21 décembre 2004 et le 20 janvier 2005, soit l’équivalent de 6500 disques DVD ou encore 10 milliards de feuillets A4. Était née la question juridique épineuse du statut des copies de sauvegarde. Dans l’urgence de la situation et afin d’éviter que le public – principalement les médias – ait accès à ces bandes, le Parlement a décidé en juin 2007 de leur appliquer le secret absolu pendant une période déterminée23.

Un chantier législatif sur la question a été initié en 2008 qui a abouti à l’introduction dans la loi sur la liberté de la presse d’une disposition excluant explicitement les copies de sauvegarde de la catégorie des documents officiels. Le raisonnement suivi par le législateur dans les travaux préparatoires est instructif sur la façon dont le législateur a résolu le défi : les développements technologiques, explique-t-il, ont rendu possible la conservation de très grandes quantités d’informations dont les copies de sauvegarde qui permettent de recréer les informations contenues dans un système informatique si celles-ci sont perdues suite à la commission d’erreurs techniques, de sabotages ou autres événements extraordinaires tels qu’incendies et inondations. Cependant, si techniquement il s’agit de documents officiels au sens de la loi fondamentale sur la liberté de la presse, autoriser leur accès ouvrirait la voie à la possibilité pour tout un chacun de procéder à la cartographie des méthodes de travail du gouvernement, situation inadéquate au regard des impératifs de sécurité de la puissance publique24. Par conséquent, tout en reconnaissant les aspects positifs du développement technologique sur le droit d’accès à l’information, notamment en tant que vecteur d’information, en élargissant les possibilités du public de s’informer, il est nécessaire de trouver un juste équilibre entre l’intérêt du public d’avoir un droit de regard sur les activités de l’administration et celui des autorités publiques de pouvoir accomplir leurs activités d’une manière efficace et en toute sécurité.

Conclusion

La Suède peut avec raison s’enorgueillir d’un droit d’accès à l’information dont la pratique autant que la lettre témoignent de son ancrage profond dans la conscience collective et de la place centrale qu’il occupe dans le système juridique et social suédois. Cette institution a des effets bénéfiques incontestables sur la société suédoise en général tels qu’un faible degré de corruption, un respect profond de la Rule of Law de la part des agents de l’administration, un esprit participatif et d’ouverture de la part des citoyens. Le positionnement de ce droit au sommet de la hiérarchie des valeurs comme de la hiérarchie des normes ne saurait cependant faire oublier une autre composante indispensable d’une société démocratique, à savoir le droit à la protection de la vie privée. Or ce droit, qui ne fait pas dans l’ordre juridique suédois l’objet d’une protection constitutionnelle à caractère général, mériterait quelquefois que le droit d’accès aux documents lui cède un peu de place. Osons espérer – et la Suède en prend lentement le pas sous l’influence du processus d’européanisation insufflé par le droit de l’Union européenne et le droit de la Convention des droits de l’Homme – que les prochaines décennies si ce n’est les prochains siècles soient celles ou ceux d’une meilleure articulation entre le droit d’accès à l’information et le droit de la protection de la vie privée.

Bibliographie

Articles

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P. Seipel, “The technology of insight: computers and informed citizens”, Law review, the Charles Green Lecture, vol. 69, n° 2, 1993, p. 421.

Livres

P. Blanc-Gonnet Jonason, Protection de la vie privée et transparence à l’épreuve de l’informatique – droit français, droit suédois et directive 95/46/CE du parlement européen et du conseil du 24 octobre, Université Paris XII, 1995.

A. Bohlin, Offentlighetsprincipen, Stockholm, Juristförlaget

T. Sefastsson, Offenlighetsprincipen i praktiken, Värnana, Bokförlaget Arena.

H. Strömberg et B. Lundell, Handlingsoffentlighet och sekretess, Lund, Studentlitteratur AB

Rapports officiels suédois

Ds 2016:2

Prop 2009/10.:8

Redogörelse 2011/12:JO1 Justitieombudsmännens ämbetsberättelse

SOU 2010 : 4. Allmänna handlingar i elektronisk form – Offentlighet och integritet,


1 Nous ne nous attarderons pas ici sur les questions terminologiques. Mentionnons seulement que le terme employé en Suède pour nommer ce que l’on qualifie en France de droit d’accès aux documents administratifs est celui de publicité des documents publics. Sur ce point, voir P. Blanc-Gonnet Jonason, Protection de la vie privée et transparence a l’épreuve de l’informatique - droit français, droit suédois et directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre, Université Paris XII, 1995, p. 329.

2 Ainsi que l’a exprimé le Professeur Axberger, ancien Ombudsman suédois à propos du principe de publicité, dont le droit d’accès constitue la composante la plus tangible. Présentation faite à Bruxelles le 3 mai 2011 à l’occasion d’une conférence organisée sous les auspices du Conseil de l’Europe. Redogörelse 2011/12 :JO1 Justitieombudsmännens ämbetsberättelse. Le principe de publicité comprend, outre le droit d’accès, la publicité des délibérations des assemblées délibérantes, parlementaires et locales, la publicité des procès ainsi que le droit des fonctionnaires de divulguer des informations destinées à être publiées. Tous ces mécanismes participent de la volonté d’octroyer au public un droit de regard dans les activités de la puissance publique. Dans le langage courant, le terme de principe de publicité est compris et utilisé comme synonyme de droit d’accès aux documents administratifs.

3 La deuxième «vague» de législations sur le droit d’accès, provenant de certains pays occidentaux a eu lieu dans années 1960-70. La troisième «vague», qui date des années 1990, est le fait d’anciens pays du bloc communiste. La quatrième «vague», qui a commencé au début des années 2000, comprend notamment des pays d’Afrique et d’Amérique latine.

4 Ces deux droits ont fait durant certaines périodes l’objet de limitations allant jusqu’à l’abolition parfois.

5 P. Seipeil, The technology of insight: computers and informed citizens, Law review, the Charles Green Lecture, vol. 69, n° 2, 1993, p.421.

6 La sécurité du Royaume et ses relations avec des pays tiers ou des organisations internationales; la politique de finance centrale, la politique monétaire et la politique des taux de change; les activités d’inspection, de contrôle de l’administration, l’intérêt des prévenir ou de sanctionner les crimes, les intérêts économiques des pouvoirs publics, la protection des informations liées à la personne et des informations économiques; l’intérêt de conserver la faune et la flore.

7 Telles les données médicales par exemple.

8 Par exemple l’article L311-6 du Livre III du code français des relations entre le public et l’administration prévoit que «Ne sont communicables qu’à l’intéressé les documents administratifs : 1° Dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée, au secret médical et au secret en matière commerciale ou industrielle.» Tandis qu’en vertu de l’article L-311-5 du même code «Ne sont pas communicables [Les documents administratifs)]» dont la communication porterait atteinte b) au secret de la défense nationale, c) à la conduite de la politique extérieure de la France.»

À titre de comparaison le § 2 du chapitre 15 de la loi suédoise sur la publicité et le secret prévoit, sous la rubrique «secret de la défense nationale» : «Le secret s’applique pour les informations relatives aux activités de défense du territoire ou de planification ou autres préparations de telles activités ou touchant d’une autre manière à la défense nationale, lorsque l’on peut s’attendre à ce que la divulgation de telles données porterait atteinte à la défense du pays ou de toute autre manière menacerait la sécurité du Royaume».

9 Les ouvrages, en suédois de A. Bohlin, Offentlighetsprincipen, Stockholm, Juristförlaget ainsi que de H. Strömberg et B. Lundeli, Handlingsoffentlighet och sekretess, Lund, Studentlitteratur AB, sont des livres référence en matière de droit d’accès rédigés par des universitaires. Un autre ouvrage d’intérêt en la matière, rédigé par un journaliste du nom de T. Sefastsson a pour titre Offentlighetsprincipen i praktiken, Värnana, Bokförlaget Arena.

10 Ainsi, par exemple, certaines administrations se sont vues critiquées par la Datainspektionen, (l’homologue suédois de la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés en France) pour avoir procédé à la publication sur leur site officiel de documents – notamment des procès-verbaux de réunions – contenant des informations personnelles. Or, une telle pratique, qui contrevient à la loi sur les données personnelles (personuppgiftslagen), ne fait pas partie des obligations que la législation sur l’accès aux documents met à la charge des autorités publiques. Les textes se limitent en effet à prévoir une obligation de divulgation des documents sur demande et ne prévoient pas d’obligation de proactive disclosure.

11 C’est le cas par exemple en matière de délais dont dispose l’administration pour faire droit à une demande d’accès à des documents officiels. Le caractère «rapide» de la communication des documents requis par la loi fondamentale sur la liberté de la presse a été interprété comme correspondant à un délai d’un à deux jours.

12 Voir Ds 2016:2, p. 79.

13 En réalité il est peu concevable, en raison des conditions posées à son application, que l’administration puisse opposer à un journaliste les futures règles sur le secret.

14 Voir l’exemple relatif à l’accès à des informations personnelles et à leur publication par des journaux infra.

15 Et plus spécialement en rapport avec le thème du présent colloque.

16 JO Decision 2014-07-10 Reg. No 180-2014, Criticism of the Municipal Executive Board of the Municipality of Kalmar for a decision not to process requests for the release of documents by a certain person.

17 Maintenant remplacée par la directive 2013/37/UE.

18 P. Jonason, The transposition of the PSI Directive into the Swedish legal system, in Public Sector Information – Open Data: What is fair: Free Access or Fees?, A. Balthasar, M. Sully, Wien, Facultas, 2014, pp. 53-63.

19 Des études effectuées par des étudiants de Master 1 à l’Université de Södertörn en fournissent des exemples.

20 En l’occurrence le dossier contenant notamment des photos de l’autopsie des victimes d’un crime avait été demandé auprès d’une juridiction qui avait fait droit à la demande. Deux semaines après sa mise en ligne sur un site Internet, le dossier avait déjà été visionné plus de 20000 fois. La législation sur la protection des données personnelles, seulement applicables lorsqu’il s’agit de protéger les données des personnes en vie, n’a été d’aucun recours pour la famille des victimes qui souhaitait la suppression du dossier du site incriminé. Il semblerait que celle-ci se soit tournée vers la Cour européenne des Droits de l’Homme. Cette instance se trouve être de fait un organe de toute utilité pour obliger l’État suédois à un renforcement de la protection pour des droits qui en Suède font office de parents pauvres de la garantie constitutionnelle, tel le droit au recours à un procès équitable en matière de décisions administratives (voir arrêt Sporrong och Lömnroth) et en matière de droit à la protection de la vie privée (Arrêt Söderman).

21 Allmänna handlingar i elektronisk form – Offentlighet och integritet, SOU 2010 :4.

22 La Thaïlande étant un lieu privilégié de villégiature pour les habitants du Nord, surtout pendant la période de Noël.

23 Prop 2009/10 : 58, p 11.

24 Prop 2009/10 : 58, p. 11.


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